Ce soir, 18 janvier, je m’en vais sous -16° à l’ouverture de l’Igloofest. Emmitouflée dans mon gros set de neige, je me rends pour la première fois à ce festival mythique. J’ai déjà froid aux pieds mais à peine entrée sur le site, l’ambiance me réchauffe vite. Le lieu est bien agencé, les gens sont colorés et prêts à danser pour contrer les températures négatives. Les outfits sont tellement cool qu’ils me font repenser le mien. J’achète un bonnet fluo pour que mes amis puissent me repérer dans l’énorme foule qui commence à se créer devant la scène. La musique est déjà bonne mais les gens sont là pour le dernier set, celui de Marc Rebillet.

Artiste américain, il est connu pour son style unique et improvisé. Ce DJ éclectique a la particularité d’enregistrer tous ses sons en une seule prise. En créant sa musique en direct, il amène toujours une touche d’humour et un style théâtral à ses compositions. Connu aussi sous le pseudo de Loop Daddy, il utilise un looper pour superposer des voix, des claviers et des rythmes couvrant une variété de genres, en restant ancré dans l’électro et le funk.

Star des médias, il gère son Instagram comme un influenceur en partageant des vidéos de ses sessions musicales. Proche de son public donc, Marc Rebillet interagit souvent avec pendant ses shows, pour prendre des suggestions de thèmes ou de sujets à improviser. Ses performances, pleines d’énergie et d’originalité lui ont valu une reconnaissance considérable.

Ce soir, à l’Igloofest, comme pour la majorité de ses sets, ce grand malade entre sur scène en peignoir. Marc Rebillet a la présence scénique d’une rockstar et n’a rien à envier à Mick Jagger. Il commence en samplant les cris de la foule, il les mixe n’importe comment et débute son set avec un bpm plutôt lent, sur des notes d’afrobeat et de DnB. Le public est déjà très chaud et toutes les têtes bougent, dans un chaos quand même ordonné. Il crie beaucoup de charabias au micro et superpose des voix très aigues sur ses compos. Moi, je découvre un aspect de la musique jusque-là inconnu à mes oreilles, comme si j’entrais dans une dimension parallèle. Je suis prise dans cette composition que je n’arrive presque pas à décortiquer. J’ai l’impression d’être face à Mozart tant ce que je ressens est spectaculaire. Dans tout ce désordre sonore, je suis en plus persuadée qu’il sait ce qu’il fait et c’est presque frustrant.

L’énergie du set monte crescendo, mais il a seulement une heure, alors c’est un crescendo relativement rapide. Il improvise en français, qui est bon, puisqu’il a passé une partie de sa jeunesse à Aix-en-Provence. A partir de ce moment, le set devient très acide et expérimental. La scénographie hyper-pop psychédélique nous aide à rentrer dans son univers fucké dans tête. Les basses ultra puissantes me tapent dans le cœur, j’ai jamais ressenti ça. C’est tellement fort et je comprends rien à ce qu’il se passe que je lui en veux presque de ne pas nous avoir avertis. Tout ce qu’il fabrique est lunaire et je me fais même la réflexion que si ce n’était pas Marc Rebillet derrière les platines, ça serait sans doute considéré comme très mauvais. Mais ça en devient bon.

Il entame la fin du set avec une compo douce au clavier ; Loopy Daddy arrive à trouver le parfait équilibre entre les moments sérieux de, factuellement, « bonne musique » et les moments crash tests où il se permet des dingueries. Il nous envoie des sonorités RnB et Old School à la fin, sur un beat moins fluo mais tout aussi rythmé. L’immense foule danse encore et moi, j’ai pas envie que ça finisse. C’est probablement le meilleur Dj set que j’ai jamais entendu. Il finit sur son banger Girl’s Club et je me mets à crier les paroles.

Je ne sais pas si Marc Rebillet est fou ou s’il utilise 100% de son cerveau mais en tout cas, il touche tous les boutons et ça fonctionne. Je ne sais pas ce qu’il prend, mais je voudrais la même chose.

Journaliste: Léna Dalgier

Photographe: Alex Guay