Mercredi 27 septembre, je me dépêche dans le Quartier des Spectacles de Montréal. J’arrive un peu en speed devant le MTelus et je reconnais le public rap. Ce soir, c’est Lil Yachty qui s’empare de la scène montréalaise. Rappeur d’Atlanta rendu célèbre en 2016 par ses pairs Quavo et Young Thug, il inscrit sa musique dans la veine du rap Soundcloud. Basses très saturées avec des 808s puissantes, influences trap et autotune comme gage de réussite en sont les caractéristiques. C’est dans le cadre de la promotion de son dernier album, Let’s Start Here que Lil Yachty a entamé sa tournée nord-américaine, le Field Tour Trip.

Dès mon entrée dans la salle, je suis saisie par une chaleur écrasante ; la plupart des boys sont déjà torse nu, tout en gardant des props dignes de gros clips de raps. Le public est très adolescent et partout où je regarde je vois des grosses chaînes dorées et des cagoules.

Le brouhaha incessant de la foule et les prods extra-saturées m’empêchent d’entendre le rappeur. Il commence par quelques tracks de son dernier album, comme drive ME crazy ! ou prETTy, qui sont les hits de Let’s Start Here. La scénographie est très simple, voire inexistante. Lil Boat est assis sur scène et ne regarde même pas son public, aveuglé par des jeux de lumières stroboscopiques.

D’un coup, une guitare électrique arrive sur scène et annonce une reprise très rock du tube de Phil Collins, In The Air Tonight. Le rappeur laisse la scène à un band composé seulement de femmes dont les performances vocales sont autrement plus impressionnantes que les siennes. Cette partie, trop courte, a été la plus appréciable du show. Sur Solo Steppin Crete Boy, le rappeur joue avec le public et essaye de capter son énergie, il loupe quand même beaucoup de phases, ce qui est dommage. Il commence à se lever sur Slide, et j’attends le premier mosh pit. Lil Yachty se repose beaucoup sur le playback et ne prend pas le temps de cacher qu’il ne chante pas.  Sur Split, le chanteur demande lui-même au public de créer un mosh pit ; les basses sont saturées, la prod est forte mais lui ne rappe pas, il laisse la musique tourner. Il saute sur scène donc les spectateurs ressentent son énergie et semblent prendre du plaisir, mais ce n’est pas un performer.

Avant Yacht Club, Lil Boat demande au public une minute de silence pour Juice Wrld, rappeur disparu en 2019 avec qui il est en featuring sur le son. C’est un moment émouvant partagé par toute la salle. Sur les sons d’après, le rappeur prend le temps de chanter un peu, backé par le public. Il lâche un 16 a cappella et c’est pas pire ! Avec ce couplet, il me fait un peu oublier mes opinions du début.

Il joue back à back Minnesota, Broccoli et iSpy et le public est très réceptif à ces bangers du rap Soundcloud.

Dans l’ensemble, le jeune public -qui est là pour l’ambiance et non pour la performance en elle-même- s’amuse puisqu’il y a des mosh pits sur toutes les tracks.

D’un œil plus critique, le rappeur coupe tous ses sons, qui durent moins de 2 minutes chacun. Le playback est omniprésent, l’autotune mal réglée et les basses bien trop saturées. Les lumières aveuglantes ne cachent même pas le manque de présence scénique de l’artiste. L’ambiance générale nous ramène aux scènes de la Soundcloud rap era. Lil Yachty explore beaucoup musicalement, avec des influences rock par exemple, mais ne pousse pas sa direction artistique assez loin pour lui permettre une bonne performance. Il contente ses jeunes fans, je pense simplement ne pas être la cible.

Journaliste: Léna Dalgier

Photographe: Helene Dickey