Enslaved

Mercredi 2 Novembre 2016 – Après Truckfighters au Connexion Live lundi soir, les copains de Noiser nous convient au Metronum pour un changement de style radical. Ils nous font un très beau cadeau avec, à l’affiche, Oceans of Slumber, Ne Obliviscaris et EnslavedEnslaved à Toulouse ! C’est tellement incroyable qu’il nous faut y être pour enfin comprendre que ce n’est pas une blague.

Il est un peu plus de 19h lorsque que j’arrive devant la salle et à cette heure, il n’y a encore pas grand monde. Les toulousains sont dépassés par le trop plein de concerts, en particulier cette semaine, il faut bien faire des choix, mais comme on dit, les absents ont toujours tort !

Les lumières s’éteignent une petite demi-heure plus tard et les texans d’Oceans Of Slumbers montent sur les planches. Je pense que la plupart des spectateurs vont les découvrir en direct. Il s’agit d’un jeune groupe formé en 2011, composé d’Anthony Contreras et Sean Gary (guitare), Keegan Kelly (basse), Dobber Beverly (batterie) et de Cammie Gilbert (chant). Cette dernière a rejoint la formation pour la réalisation du second album, Winter, sorti cette année. Un changement important pour le groupe puisque le premier vocaliste était un homme.
Les membres d’Oceans Of Slumbers nous déversent alors leur metal progressif aux mélodies aériennes. Les compositions sont bien équilibrées et toutes en nuances, la douceur et la légèreté viennent agréablement contraster avec des parties plus agressives. La voix suave et enveloppante de la gracieuse Cammie est d’une justesse impeccable et vient s’opposer au chant death de Sean. Côté musiciens, et bien ça joue ! On ressent diverses influences (metal, jazz…) et surtout qu’il y a un vrai travail d’écriture avec des modulations rythmiques fréquentes et des riffs accrocheurs, puissants mais aussi très mélodiques. Les américains nous auront fait passer un bon moment, plein de musicalité et tout en subtilité.

Le public est plus dense, environ 300 personnes ont fait le déplacement et nombreux sont les fans du groupe qui s’apprête à jouer: Ne Obliviscaris. Bien que la formation australienne soit née en 2003, ce n’est qu’en 2012, qu’elle sortira un premier album intitulé  Portal of I, suivra rapidement Citadel. Il est presque 20h30 lorsque le Metronum est de nouveau plongé dans le noir. La scène se teinte d’une lumière bleutée et les membres de Ne Obliviscaris apparaissent : Daniel Presland à la batterie, Brendan Brown “Cygnus” à la basse, Matt Klavins à guitare rythmique, Tim Charles au violon et chant clair, enfin, Xenoyr au chant death et notre petit français, Benjamin Baret à la guitare.
C’est la première fois que j’assiste à leur prestation live, j’étais assez curieuse car, en écoutant les albums, j’étais incapable de réellement dire “j’aime” ou “j’aime pas”. Le gros point fort c’est que leur musique est vraiment recherchée et originale avec ce mélange de métal progressif, de death et de mélodique. Ce qui me dérange c’est la voix de Tim, je ne sais pas exactement dire pour quoi mais ça me gène à chaque écoute et du coup, je perds le fil.
Qu’est ce que ça donne en live ? Et bien clairement, musicalement c’est vraiment très bon, les compositions complexes, pleines de variations et de belles mélodies prennent toute leur dimension. Les parties “tech death” sont excellentes, la rythmique assurée par le duo batterie/basse, Daniel/Cygnus est dingue, ça groove, ça blast, j’adore ! Benjamin et Matt se complètent bien, envoyant les riffs mélodieux et acérés avec une dextérité impressionnante. Tous les instruments sont mis en valeur, chacun des musiciens s’exprime pleinement. Le son du Metronum, réglé au poil, nous permet de savourer chaque note, et met particulièrement le violon en valeur… c’est magnifique. Vocalement, j’ai toujours du mal à accrocher au timbre du violoniste qui possède pourtant une voix limpide et juste. Bizarrement quand je l’entends, je l’imagine plus dans le rôle un beau prince Disney. Ceci ne remet pas en cause son talent (chant et violon), de plus, il communique très bien avec le public. Puis, il y a Xen, ce chanteur mystérieux, caché derrière ses longs cheveux bruns. Toujours sur la réserve (on stage et off stage), il en impose néanmoins par son charisme naturel et son growl, surpuissant, le genre de growl qui vous donne la chair de poule.
Les titres de Ne Obliviscaris sont très longs (au moins dix minutes) mais pas redondants pour un sou car tout est travaillé au millimètre près. L’ambiance change régulièrement, un instant on ferme les yeux en se laissant transporter par les nappes atmosphériques et sublimes accords mélodiques. L’instant d’après, nous sommes secoués par les parties brutales avec du gros blast et le chant death pugnace. Le tout est harmonieux, gracieux et exécuté à la perfection…c’est beau tout simplement…
A revoir plus longuement. 

On reprend ses esprits avant l’arrivée des géants norvégiens d’Enslaved qui fêtent leurs 25 ans d’existence. S’il ne reste que le chanteur/bassiste Grutle Kjetil “Kjellson” et le guitariste Ivar Peersen “Bjørnson” comme membres d’origine, le line-up est tout de même stabilisé depuis 2004. Le guitariste Arve Isdal, le batteur Cato Bekkevold et le claviériste/chanteur Herbrand Larsen complètent la team. Le groupe sortait un treizième album, In Times l’an dernier et passait au Hellfest il y a quelques mois, passage que j’ai malheureusement manqué. Au cours de ses 25 années d’activité, Enslaved a su faire évoluer son black metal viking en y ajoutant ce côté progressif qui fait aujourd’hui partie intégrante de son style. J’ai hâte de voir ça, car pour moi c’est une première et que ce dernier album m’a bien mis l’eau à la bouche.
Les musiciens s’installent sur la scène brumeuse et démarrent sur les chapeaux de roues avec Roots of the Mountain et son introduction fulminante typiquement black metal. Ils enchaînent avec la plus calme et prog Ruun, Les lumières rougeoyantes et le rideau de fumée nous plongent dans l’ambiance et le son est toujours impeccable. Enslaved va nous régaler pendant plus d’une heure avec une setlist bien équilibrée, jonglant entre anciens et nouveaux morceaux. Kjellson est un sacré bonhomme, doté d’un talent indiscutable et d’un charisme fou. La scène lui appartient et on remarque qu’il prend plaisir à jouer ainsi qu’à communiquer avec son public. Son jeu, son chant, sa bonhomie…on ne peut qu’apprécier le voir évoluer sur les planches. On sent également qu’il y a une belle complicité entre les membres du groupes, ce qui donne encore plus de vie au show.
Nous aurons droit à Building With Fire, le rendu en live est différent, encore plus prenant. Les riffs ravageurs sont rudement efficaces. La voix délicate d’Herbrand est très agréable et vient délicieusement contraster avec le chant black acéré du bassiste. Les deux guitaristes s’opposent autant qu’ils se complémentent. Il y a d’un côté l’impétueux Arve Isdal, torse nu qui gigote dans tous les sens, de l’autre le flegmatique Ivar Peersen qui ressemble à un gros nounours. Chacun déverse ses riffs et mélodies à sa manière mais tous deux le font très bien. Cato assure grave à la batterie, sa frappe est précise et robuste. Son jeu est exquis et particulièrement impressionnant sur des titres comme Fenris à la rythmique galopante (qui plait à la thrasheuz’ qui sommeille en moi) et ses passages véloces, où le batteur fait claquer la caisse claire et fumer la double pédale. Après cette violence exacerbée quoi de mieux qu’un peu de douceur? Je ferme les yeux et me laisse totalement transporter par le sublime titre qu’est The Crossing. Là, pour le coup, je suis partie ailleurs, oubliant même que je n’étais pas seule…magique ! Enslaved s’éclipse après The Ground.
Les norvégiens sont chaleureusement applaudis, le batteur revient pour un solo. Le claviériste le rejoint et viendra le taquiner avant de reprendre sa place pour nous offrir encore deux titres. Grutle et ses compères nous balancent donc
One Thousand Years of Rain, qui ressort merveilleusement bien en live, ce morceau vous prend aux tripes tant il est intense. Le set sera clôturé par la puissante Allfǫðr Oðinn, histoire de finir en apothéose.

Que dire à part que le concert d’Enslaved était une tuerie ! J’ai pris une grosse claque. Merci ! Un immense merci à Noiser pour ce plateau de choix (difficilement égalable) et de nous avoir permis de passer une superbe soirée en compagnie de trois très bons groupes.

Auteure et photographe: Fanny Dudognon