Hellfest 2024 – J4 : The Offspring + Foo Fighters + Simple Plan + Queen of the Stone Age + Corey Taylor et autres @Clisson
Neck Deep (13:10-13:50 // MainStage 2)
Nova Twins (13:55-14:35 // MainStage 1)
Simple Plan (14:40-15:25 // MainStage 2)
Shadow of Intent (16:00-16:45 // Altar)
Ces américains existent depuis une décennie… mais je n’ai encore jamais entendu parler d’eux ! La scène est tellement saturée à l’heure actuelle qu’on peut passer son temps à découvrir des groupes sans pour autant faire le tour de la question… Mes camarades de covoiturage m’ont conseillé d’aller voir cette formation, qui s’apparente à la mouvance deathcore… mais avec un côté mélodique, voire symphonique, prononcé. On connaît les orchestrations de groupes comme Emperor ou Dimmu Borgir tous deux issus du black metal… mais je n’ai encore jamais éprouvé le mélange entre le deathcore et le symphonique. Est-ce que ça va passer ?
Et bien ça passe crème ! Musicalement, ça me fait penser à Lorna Shore et, dans une moindre mesure, à Aversions Crown. Le chanteur a une voix terrible ! Comme Slaughter To Prevail deux jours auparavant, je me demande dans quelle mesure il utilise des effets car c’est parfois tellement caverneux que c’en est incroyable… Cependant, les parties orchestrales sont samplées, les seuls musiciens étant les « rockeurs » (c’est-à-dire le tryptique guitare, basse, batterie). Je ne dirai pas que j’ai retenu une chanson en particulier mais j’ai vraiment pris une grosse claque et je vais m’intéresser à ce groupe de retour à la maison…
Frank Carter & The Rattlesnakes (16:25-17:15 // MainStage 2)
Wiegedood (16:50-17:40 // Temple)
Juste après les deathcoreux, je reste un peu pour voir ce que donne le groupe belge Wiegedood. Leur mélange de black est basé sur des riffs répétitifs et sinueux, ce qui confère un côté hypnotique à la chose. C’est bien fait mais ce n’est pas ma came. Je vais donc faire un tour à l’espace VIP, où je rencontre quelques personnes (dont le gentil monsieur qui nous sert les dégustations de Jägermeister depuis au moins 2008… ainsi que Victor, de l’équipe des Challenger, qui récupère les gros costauds comme moi quand ils slamment). L’espace VIP est blindé en ce dimanche ensoleillé. L’endroit est cool mais il y a encore plein de bons concerts sur le site donc je ne reste pas longtemps.
Royal Blood (17:20 -18:15 // MainStage 1)
Je suis tombé tout à fait par hasard sur Royal Blood. Je souhaitais assister à la fin du show de Frank Carter And The Rattlesnakes mais c’était trop tard… Du coup, puisque j’étais là, je suis resté pour me faire une idée. Et j’ai bien fait car j’ai découvert un super groupe ! Ce qui est surprenant, c’est que c’est un duo… et ils arrivent parfaitement à occuper l’espace sonore. A priori le chanteur / bassiste utilise simultanément deux amplis, l’un pour la basse et le deuxième pour la guitare ainsi qu’une pédale de type octaver (qui permet de superposer ou de changer les octaves). Tout ce matos confère la distorsion suffisante pour que l’ensemble ne sonne pas creux. Et c’est incroyable de voir à quel point ça donne le change ! Les vocaux sont mélodiques, les riffs sont simples mais efficaces. Le côté léger, joyeux et un brin frivole me fait penser à Mr. Big ou ce genre de groupes hard rock mélodiques. Définitivement une bonne surprise et un groupe qu’il faut impérativement que j’écoute attentivement de retour à la maison (un de plus) !
Corey Taylor (18:20-1920 // MainStage 2 )
Suffocation (19:45 -20:45 // Altar )
Suffocation – ou « suffo » pour les intimes – c’est comme un vieux pote, un mec qui a toujours fait partie de ton entourage et qui n’a jamais changé son fusil d’épaule, même s’il a un caractère de merde qui déplaît à certains. Bon gré, mal gré, le groupe a toujours fait partie du paysage musical (à part un split de quelques années à la fin des 90’s) et il a toujours occupé une place de choix sur l’autel du death metal, alliant la brutalité du propos à une aisance technique insolente. Mais point de tergiversations progressives chez eux, le but étant avant tout de défoncer les feuilles des auditeurs.
Malgré leur constance, les fans hardcore étaient inquiets car l’avant-dernière offrande studio, « …Of The Dark Light » datait de 2017 et la défection de l’emblématique chanteur Frank Mullen, parti se consacrer à des activités plus « paisibles », semblait sonner le glas des troupes… On pouvait légitimement se demander si l’intensité allait être maintenue. Mais c’était sans compter sur le niveau d’exigence imposé par Terence Hobbs et sa bande. Quand on joue dans Suffo, on se donne à 200%.
Le dernier album studio s’intitule « Hymns From The Apocrypha », il est sorti en fin d’année dernière sur Nuclear Blast et, à défaut d’être exceptionnel et novateur, nous rassure sur l’état des troupes. Mais c’est véritablement en live que la formule prend tout son sens. Et à ce titre, un seul mot me vient à l’esprit : la boucherie.
Comment ce groupe arrive-t-il à ce niveau d’intensité ? C’est incroyable ! Le chanteur Ricky Myers, à l’origine batteur de Disgorge, a repris le flambeau et il a parfaitement trouvé sa place, son spectre vocal étant proche de Frank et son exécution étant spectaculaire. En outre, tout le monde est à donf’ dans le groupe ; c’est une vraie machine de guerre !
Les new-yorkais interprètent les meilleurs titres de leur dernier opus, à commencer par « Seraphim Enslavement » ou « Perpetual Deception » et ils balancent les parpaings comme d’autres enfilent des perles : « Jesus Wept », « Funeral Inception », « Catatonia » ou « Liege Of Inveracity »… tout fait mouche ! Finalement, ce show est aussi bon – si ce n’est meilleur – que leur concert donné à Toulouse en février dernier. « Suffo est mort… …vive Suffo ! »
††† – Crosses (19:45 -20:45 // Valley )
Tiamat (20:50-21:50 // Temple )
Je connais peu Tiamat : j’ai acheté « Clouds » au moment de sa sortie mais je n’ai pas vraiment suivi la suite de leur carrière. La set list me semble très old school… A-t-elle été spécialement conçue pour le Hellfest ? Elle fait la part belle aux deux plus gros succès commerciaux des suédois : « Clouds » en 1992 et « Wildhoney » en 1994.
Globalement, j’ai apprécié leur concert, surtout les titres « In A Dream » et « The Sleeping Beauty ». La dégaine improbable du chanteur (portant toque, lunette noire et pantalon de toutes les couleurs) démontre à quel point il met un point d’honneur à tracer sa propre voie, ce qui se retranscrit dans sa musique. Et je ne peux qu’approuver cet état d’esprit. Pour le reste, Tiamat n’est pas mon groupe favori…
Foo Fighters (22:00-00:00 // MainStage 1 )
Foo Fighters est le « gros événement » de cette édition 2024, eu égard à son rattachement à la scène rock plutôt que metal. Le groupe est très populaire et cela se vérifie par l’affluence massive devant la MainStage.
Le traumatisme consécutif à la mort du précédent batteur, Taylor Hawkins, est encore présent dans tous les esprits. Son remplaçant, le batteur star Josh Freeze, est passé par tellement de groupes connus (de Suicidal Tendencies à Nine Inch Nails en passant par Guns’n’Roses ou Rob Zombie) qu’on peut être rassuré sur la faculté du combo à envoyer le bois.
De mon côté, je ne suis pas très connaisseur de la discographie des Américains : un peu comme Tiamat, j’avais acheté leur premier album en 1995 (car tout le monde attendait le père Grohl au tournant après le split de Nirvana) mais je m’étais arrêté là. Des années plus tard, j’avais acheté l’album « Sonic Highways ». Ces deux disques sont bons mais je n’éprouve pas une attirance énorme. Pour autant, j’ai beaucoup de respect pour Dave Grohl, qui a prouvé tout au long de son parcours qu’il vivait sa musique à 200%, en collaborant avec plein de personnalités illustres de la scène rock : son apparition dans le film « Lemmy » est géniale et j’avais bien aimé son projet PROBOT, avec des mecs de Voïvod, Celtic Frost, Venom… bref, la crème de la crème !
Je pense donc qu’il a toute sa légitimité sur la scène du Hellfest. De toute façon, cela fait des années que la programmation s’élargit vers des contrées plus abordables, n’en déplaise aux puristes. Moi, ce que je constate, c’est qu’on peut toujours en prendre plein la gueule grâce à de nombreux groupes extrêmes (par exemple Anaal Nathrakh cette année… qui a donné un show d’une sauvagerie inouïe).
Je n’ai pourtant pas assisté à leur concert, si ce n’est par petits bouts et de loin (comme Metallica en 2022). Ce que j’ai entendu m’a paru plutôt bon, notamment la chanson « White Limo ». Et bien que je ne kiffe pas trop le fond (les morceaux tels qu’il sont composés ne me parlent pas plus que ça), j’apprécie la forme : un rock bien nerveux avec des vocaux (très souvent) criés… Dave s’est-il spécialement montré déchaîné ce jour-là pour « correspondre » aux attentes des Hellfesters ? En tout cas, bravo à lui pour son imposante présence et, dans une moindre mesure, bravo aussi à ses musiciens car ils ont rempli le contrat…
I Am Morbid (21:50-22:55 // Altar)
Je considère Morbid Angel comme l’un des meilleurs groupes de death metal de tous les temps et leur musique m’a profondément marqué. Mais il faut bien avouer qu’ils ont perdu de leur superbe depuis une vingtaine d’années. Je ne suis donc pas étonné que ce projet, réunissant deux membres du line-up mythique qui a mis en boîte les quatre premiers disques, se lance en parallèle de la carrière de M.A. I Am Morbid se concentre légitimement sur la période 1989-1995, celle qui a vu l’apparition des monumentaux « Altars Of Madness », « Blessed Are The Sick », « Covenant » et « Domination ».
Le charisme de David Vincent n’est plus à démontrer et sa voix à la fois profonde et personnelle apporte une coloration unique à la musique. La légitimité du batteur Pete « Commando » Sandoval, qui a donné ses lettres de noblesse au blast beat (au même titre que Mick « Human Tornado » Harris de Napalm Death) ne peut pas non plus être remise en cause et, ce soir, la batterie cartonne à mort comme si le temps n’avait pas de prise sur le salvadorien. Quant aux deux guitaristes live (dont un body builder), à défaut d’égaler le jeu très spécifique du guitariste historique de M.A. Trey Azagthoth, ils le remplacent plutôt habilement.
La set list est imparable, c’est un pur best of : « Immortal Rites », « Maze Of Torment », « God Of Emptiness » ou « Where The Slime Live »… rien à jeter, tout est bon ! …Ça fait juste mal au cœur de constater que ce tribute band propose une musique meilleure que le groupe original… Morbid Angel pourra-t-il reprendre la place qui était la sienne dans les années 90 ? Rien n’est moins sûr…
Dimmu Orgir (23:00-00:00 // Temple)
Dimmu Borgir est un groupe clivant au sein de la scène car considéré comme trop commercial par les true alors que les autres admettent leur côté novateur et sophistiqué… choisis ton camp, camarade !
Moi j’ai choisi : j’aime ce groupe, bien que j’avoue avoir une nette préférence pour l’album « Enthone Darkness Triumphant » avec lequel je les ai découverts en 1997 (au passage, le disque le plus représenté ce soir avec deux extraits). Et il faut bien reconnaître qu’ils se font plus rares ces dernières années, le rythme de leur sortie discographique ayant chuté depuis 2010. Leurs deux derniers albums studios ont moins bien marché qu’avant et leur récent disque de reprises est un peu anecdotique… à la lumière de tous ces facteurs, je ne m’attendais pas à ce que la Temple soit aussi bondée. Mais c’est ce qui est génial avec le public metal, surtout en Europe : les fans font preuve de mémoire et de fidélité.
L’affluence est peut-être également due au fait que le groupe fête son trentième anniversaire sur cette tournée. On a donc droit à une set list très bien équilibrée entre les différents albums. Sans surprise, les titres qui m’ont le plus plu sont : « Spellbound (by the Devil) », « The Chosen Legacy », « Progenies Of The Great Apocalypse » et « Mourning Palace » en clôture du bal (qui remporte d’ailleurs tous les suffrages de la part du public). On a droit à un gros light show, bien plus convaincant queI Am Morbid juste avant, et les zicos portent toujours leurs fameux costumes et leur maquillage… le décorum propre au black metal (symphonique) est conservé. En plus des lights, distillant des ambiances tantôt vertes, bleues ou rouges transpercées de traînées blanches, un mur de flammes rajoute au côté dramatique de la prestation. Dimmu Borgir a livré une prestation très propre, a prouvé qu’il gardait toute sa suprématie sur la scène et nous a offert une très bonne fin de fest ! Les musiciens sont ovationnés comme il se doit, ils saluent le public et le remercient chaleureusement puis ils prennent une photo depuis la scène ; et ça y est, le dernier moment du Fest est arrivé… snif !
Globalement, cette édition s’est très bien déroulée. J’en ai vécu tellement que je ne saurai dire si c’est ma préférée… À défaut, ce cru 2024 figurera parmi mes tops. La pluie insistante du samedi a un peu écorné la fête mais le Hellfest ne peut être tenu responsable de ce facteur impondérable. Au contraire, il prouve qu’il sait réagir rapidement lors de ces coups durs car le site était remis au propre dès le dimanche matin.
Les conditions d’accueil sont sans cesse améliorées (ce qui n’est pas forcément le cas d’autres événements) : par exemple, une passerelle métallique a été installée pour que les campeurs puissent facilement passer la glissière de sécurité de la rocade est avec tout leur lourd matos. Autre exemple : l’accès PMR a été facilité pour les MS.
Comme chaque année, parmi la programmation gargantuesque, il y a pléiades de formations que je regrette d’avoir ratées, entre autres : Biohazard, Mr Bungle (qui a notamment repris « Territory » de Sepultura avec la présence en guest star d’Andreas Kisser !), Madball, Accept, Frank Carter, Eternal Champion, Brutus, Satyricon, Nile, Extreme… et certainement plein d’autres que je ne connais pas encore… il y a tant à faire dans ce vaste domaine musical ! En 2024, j’ai assisté à très peu de concerts sur la Valley et la Warzone. C’est un peu le hasard de la programmation ; mais il est sûr que l’éloignement de la Valley n’est pas propice pour faire des concerts au débotté.
Le point le plus problématique concerne, depuis plusieurs années, les difficultés de circulation sur ce site qui n’est pas extensible à foison ; ceci implique qu’il faut vraiment anticiper ses déplacements si on veut être correctement placé lors des concerts suivants… sans garantie que cela fonctionne pour autant… J’ai quand même l’impression que l’ouverture de la Valley l’an dernier a amélioré un peu les choses à ce niveau. De même, le fait de ne servir que des pintes plutôt que des demis concoure à fluidifier l’attente aux bars. Ça a aussi l’avantage d’aboutir à un nouveau record de vente de bière : 500 000 litres !! Les esprits chagrins ajouteront « ça pousse à la consommation »… mais personne n’est forcé d’acheter s’il n’en a pas envie… On se consolera en se disant que cela a pour conséquence d’accroître l’auto-financement de l’association.
Un autre désavantage, mineur cette fois, concerne la couverture réseau : certaines communications passent mal ou pas du tout suivant l’opérateur de téléphonie dont on dépend… mais il faut reconnaître que ce point a été considérablement amélioré depuis une dizaine d’années grâce à l’installation de plusieurs pylônes de télécommunications (un déjà existant qui a été recouvert d’une toile indiquant « Hellcom » à côté de l’espace VIP plus un pylône flambant neuf situé au Yellow camp).
L’innovation majeure en 2024, à mon avis, tient à l’apparition de La Gardienne Des Ténèbres et je suis persuadé que ceci sera considéré rétrospectivement comme une étape décisive dans la pérennisation du festival.
L’orientation artistique du festival est toujours très éclectique ; d’un côté, par volonté de renouvellement, l’organisation programme des formations pas vraiment metal (Foo Fighters, Shaka Ponk, The Prodigy…) mais, de l’autre côté du spectre, on continue d’avoir droit à des formations extrêmes / obscures / en devenir / rarissimes en Europe… Du coup, côté public c’est un peu comme si deux mondes cohabitaient : d’un côté, des gens plutôt néophytes (en tout cas « grand public », sans connotation péjorative), de l’autre des passionnés hyper pointus dans leur domaine de prédilection (stoner, hardcore, black…). C’est peut-être de la naïveté de ma part mais j’ai le sentiment que tout ce beau petit monde se côtoie dans un esprit de tolérance.
A titre personnel, je suis content que le Hellfest m’expose à de nouvelles tendances comme Polyphia, Landmvrks… et je suis ravi de constater que les vieux de la vieille, ceux qui rythment ma vie et celle de tant d’autres personnes depuis si longtemps, gardent de très beaux restes : Sodom, Megadeth, Metallica, Dickinson, Accept, Saxon, Emperor, Dimmu Borgir, Fear Factory… les bonnes choses sont intemporelles !
Le Hellfest reste donc un super moment à vivre chaque année et il nous laisse d’indéfectibles souvenirs. Après cette grande communion de notre communauté métal, nous regagnons chacun nos territoires respectifs. Nous allons tous vivre de super événements durant l’année qui va s’écouler : on va participer à de bons concerts dans nos villes d’attache, on va découvrir les nouveaux albums de nos groupes favoris – ou ceux de jeunes espoirs – mais on sait qu’on va tout faire pour revenir l’an prochain et reprendre une bonne dose de metal à Clisson.
Merci à toute l’équipe du Hellfest et à tous les bénévoles pour nous offrir de si bons moments… et à l’année prochaine 😊
Photographe : David Vacher
Auteur : Benoît Gazin