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20 juin 2016 – C’est un public impatient qui remplit le deuxième étage des Foufounes Électriques en soirée. Il faut dire que les fans montréalais de hardcore devaient avoir marqué un gros X noir sur leur calendrier. NAILS, le groupe de powerviolence qui a atteint un statut iconique dans la scène hardcore depuis leur tout premier album de quatorze minutes, Unsilent Death (2010), était en ville. Les fans devront toutefois attendre trois heures et passer à-travers quatre premières parties avant de voir la formation californienne. Les autres groupes allaient-ils refroidir les ardeurs de la foule ou faire dégénérer le tout?

La formation locale qui ouvre la parade, Prowl, répond plus ou moins à cette question. On est gâtés lorsqu’ils sont au sommet de leur énergie ou qu’un solo de guitare effréné et bien fignolé se glisse dans une piste, mais le band manque de synchronisme et de rythme entre ces moments. Leur gig  se termine sur une note aigre-douce, bien qu’ils en aient laissés plusieurs surpris par leur sonorité crossover trash, donnant un ton plus métal que prévu à la soirée.

Eternal Sleep vient confirmer l’atmosphère hybride hardcore/métal extrême du spectacle avec du metalcore digne de ce nom. Le groupe rattrape les fautes de Prowl avec une performance enragée et aggressive d’un bout à l’autre. Les passes aux teintes de sludge s’effondrent sur le public avec une lourdeur remarquable, notamment grâce aux sonorités abyssales de la guitare. Joseph Sanderson, le vocaliste a également une présence de stage polarisante alors qu’il marche, cours et saute d’un membre du groupe à l’autre comme pour bien propager son aura. L’adrénaline remonte après une performance au rythme bien coordonné.

Celle-ci n’a pas le temps de redescendre alors que God’s Hate entame avec urgence leur partie de la soirée. Du hardcore revendicateur contemporain comme on l’aime, la foule n’a pas le temps de souffler, à-moins d’un bref discours revendicateur du groupe. On entendra le vocaliste préciser «This song is about killing rapists» avant Headstone (The Scum) et le fameux «I’m not a crook.» de Richard Nixon avant Admission of Guilt.

C’est par la suite que la surprise de la soirée vient percuter de plein fouet les Foufs. On peut en effet lire la surprise (positive) dans les visages après les toutes premières mesure que Full of Hell nous crache au visage. Leur grindcore déjanté est ponctué par des drum fills d’une rapidité et d’une technique déconcertante et alimenté par le mur de distorsion émit par les cordes, dont les notes sont à peines perceptibles pour la même raison. Dylan Walker vient complimenter cette atmosphère de boucherie, tout d’abord grâce à ses cris déchirants d’une énergie hors du commun, ensuite par ses expérimentations électroniques, question d’ajouter encore plus de bruit! La foule réagit avec enthousiasme et n’avait pas été aussi violente depuis le début de la soirée. Le groupe offrira une sélection de chanson quand même diversifiée, comportant quelques fois des breakdowns hyper embourbés  et même des passages chantés dont on aurait pu se passer (il faut dire qu’après avoir crié comme Walker, n’importe qui aurait chanté faux comme lui).

La barre est donc assez haute pour NAILS, qui ne se fait que prier pour la monter encore plus haut. Ce qu’ils accomplissent avec la puissance qui a fait leur nom. Leur seule apparition sur la scène est suffisante pour que le public soit tenu en haleine et prêt à mettre le bordel aux Foufounes Électriques. Avant de commencer, Tom Jones invite le public de la main à commencer un circle pit, qui se transformera plutôt en hardcore dance, puis lance le traditionnel «We’re fucking NAILS!» avant d’engendrer environ une heure de violence musicale sans répit. En personne, le groupe continue de faire valoir ce pour quoi il est reconnu : des riffs infernaux, punitifs et déferlants qui ne perdent jamais  de puissance, ni d’originalité. On voit ce qui a fait que le groupe s’est démarqué au fil des années : à l’intérieur d’une composition très courte, NAILS est capable d’incorporer plusieurs idées et les coordonner de façon à ce que le public n’ait pas une seule seconde de répit. Le band se surpasse encore plus lorsque Leon del Muerte (Impaled, Exhumed, Murder Construct), spécialement guitariste de la formation pour la soirée, exécute un solo à la perfection, rappelant Kerry King dans son jeune temps à-travers l’exécution. Le groupe donne un spectacle relativement court (leur discographie dure à peine une heure), mais on n’aura pas vu le temps passer. Du tout. C’est à se demander si les Foufs étaient capable d’en prendre bien plus.

Auteur & Photographe: Louis Desautels