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22 janvier 2016 – C’est en ce vendredi que les marginaux se sont rassemblés en toute intimité, dans une antre mystique de fumée et d’alcool, sous un éclairage mauve, rouge, turquoise aux aspects vampiriques. De tous les bars, ce sont Les Katacömbes qui recréent haut la main l’ambiance occulte et maléfique la plus authentique. Chaleur et déchéance au rendez-vous, les adeptes de l’univers « dark, heavy ‘n groovy » étaient prêts à rendre hommage à la scène Doom et Stoner.

De la scène étroite au parterre de superficie restreinte, tous respiraient le même air; prisonniers du manque d’espace. Perchés au balcon, certains observaient minutieusement, alors qu’en bas, les têtes tombaient lourdement, les poings brandis dans leurs vestes de cuire. Sur scène, Starlight Ritual faisait preuve de technique et de discipline, jouant d’une musique épique, mais à la fois mystérieuse. Le quintette semblait absorbé par l’ambiance d’horreur et de psychédélisme; tous répondaient à l’appel lumineux, finement voilé d’une note plus grave, d’une atmosphère dramatique.

Sous l’emprise du charismatique chanteur Damian, la foule s’activait, intrigué par la sournoise influence de rock ‘n roll, la signature « old school » du groupe. D’une voix forte et polyvalente, l’homme guidait la formation montréalaise, dictait l’aspect scénique alors que les quatre autres musiciens communiquaient avec complicité et expertise, s’occupant du rythme, de la technique et de l’interprétation.

Sous la fumée et les nuages de brume, sous les cris, la sueur et les applaudissements, les Montréalais quittèrent humblement, laissant dorénavant place à une essence sinistre…

Cauchemar apparurent sur scène, munis d’un décors authentique faisant appel à l’époque gothique et victorienne. D’un air sévère, ils prirent place aux côtés de l’autel satanique spécialement dressée pour leur prestation, ce rite malsain agrémenté d’horreur et de fougue. Sous sa longue cape, derrière son micro, Annick Giroux débuta le rituel noir…

Guidé par un effet sombre et funèbre, le groupe semblait en contrôle, alors qu’il dégageait une attitude confiante, harmonieuse. Jouant leurs obscures morceaux, les « headbangs » et les grimaces lucifériennes s’accumulaient. D’un air inquiétant, d’un son et d’une ambiance fantasmagorique, ils oscillaient entre le latent et l’explosif. De La Vallée Des Rois, à Magie Rouge, Funérailles Célestes et le rappel Le Fantôme, le public semblait sous l’emprise lugubre du quatuor, ensorcelé par les basses fréquences enivrantes et précises d’Andres Arango.

Ce fut une performance théâtrale imagée selon le folklore britannique typique de l’univers Doom: un pure hommage aux ténébreuses mélodies et à l’esthétisme glauque. Les percussions, pesantes, déferlaient sur la foule, alors que la voix hantaient la pièce. Le tout était assourdissant, hypnotisant de part son rythme et le son travaillé. L’ensemble rappelait les pionniers et les dieux de la lourdeur malsaine et lascive; Black Sabbath, Pentagram, Electric Wizard…

Le mysticisme pris cependant fin, alors que Magic Circle prirent les devants. Après non loin d’une demie heure d’attente, une aura beaucoup plus axée sur la scène New Wave Of British Heavy Metal vint rompre l’effet lourd et langoureux de la soirée, amenant un son davantage mouvementé et inspiré de l’âge d’or du métal: les années 80. D’un style épuré et d’une mouvance corporelle molle, ce fut au chanteur d’établir la cadence, bien fidèle à son rôle de rockeur, qui contrastait largement avec celui des prédécesseurs. Le musicien hurlait d’une voix aiguë et claire, à mi-chemin entre celles de Ronnie James Dio et de Rob Halford (Judas Priest), offrant au passage quelques déplacements enjoués et déterminés. Un peu plus staccato et rapide que ce que la scène Doom prône habituellement, le groupe du massachusetts émanait tout de même une aura ténébreuse, captivante et digne de la soirée, offrant aux spectateurs une musique solide, assumée et distincte.

Par un soir tapissé de contes médiévaux et d’épouvante, les trois groupes ont su léguer à la foule un hommage unique et inattendu à la scène Doom et Heavy, un culte ingénieux priorisant l’aspect plus mélodique et atmosphérique d’un style habituellement abusé par la distorsion et la rouille. En attendant une prochaine soirée, les quelques disciples tatoués n’auront d’autre choix que de faire tourner leurs poussiéreux vinyles…

Auteure: Charlotte Lamontagne

Photographe: Thomas Mazerolles