La Colonie de Vacances

Mercredi 22 novembre – Une semaine, c’est le temps qu’il nous aura fallu pour nous remettre de nos émotions, après la tornade noise venue des quatre coins de la France, et qui a balayé le Bikini de Toulouse mercredi dernier. La joyeuse troupe de La Colonie de Vacances, qui réunie les quatre formations françaises Marvin, Pneu, Electric Electric et Papier Tigre, nous a livré un concert euphorisant et décapant. Âmes sensibles, s’abstenir!

Pour la petite histoire, c’est en 2010 et au fil des tournées communes à partager bus, bières et piaules, que les quatre groupes décident de former cette fameuse “Colo”. C’est un projet un peu fou qui consiste à jouer en simultané à onze musiciens avec “un dispositif de sound system quadriphonique qui place le public au centre d’un match de ping-pong sonique à deux, trois ou quatre équipes”, expliquent-t-ils. Chacun y apporte sa propre sensibilité musicale, que ce soit les influences électroniques de Marvin, le vocal plus mélodique de Papier Tigre, en passant par les sons entêtants issus de la transe rock d’Electric Electric et le côté totalement déglingo math rock de Pneu. Sur le papier, la promesse est singulière et plus qu’alléchante, bien qu’on mette un petit bémol dans la pratique.

L’excitation monte dès l’arrivée au Bikini, alors qu’on découvre la disposition des scènes aux quatre coins de la fosse, qui encadrent le public. Le concert débute, et on se trouve immédiatement immergé dans l’univers ultra énergique de la Colo. Leur son expérimental, déstructuré et dissonant, alimenté par une rythmique complexe, prend le pouvoir sur les corps transpirants qui s’électrisent et s’entrechoquent. Petit à petit, on plonge dans un état de transe, savamment entretenu par une alternance de gros riffs, de quelques mélodies et de moments de respiration sous tension. Le pogo est le seul moyen de locomotion dans cette fosse compacte, avide de sensation – alors on suit le flux et le reflux pour passer de scène en scène, au plus près des artistes.

L’ambiance est bon enfant, tant dans le public que sur scène. On ressent vraiment l’esprit de la bande de potes qui se retrouve et balance du bon son. Ils jouent tantôt ensemble, tantôt à deux ou trois ou encore l’un après l’autre, avec un effet stéréo plutôt intéressant. Malgré cela, l’expérience sonore en quadriphonie ne nous convainc pas tout à fait. Le concept repose sur l’idée d’un point d’écoute “parfait” situé à équidistance de chaque scène – au milieu du pogo donc. Dès que l’on s’éloigne, les sons s’entremêlent et donnent un rendu parfois brouillon, notamment au niveau du chant qui se perd dans la superposition des lignes musicales. On se retrouve au final avec une balance un peu déséquilibrée, et on perd en qualité. Cela dit, on imagine la complexité de l’exercice quadriphonique et on salue le travail de La Colonie de Vacances qui pousse toujours plus loin son perfectionnement. Ils annoncent une nouvelle composition pour 2018, qui devrait offrir différents niveaux parallèles d’écoute afin que chaque spectateur puisse profiter d’une qualité musicale et sonore optimum, quelque soit sa position par rapport aux scènes. 

En attendant, nos réserves liées à la configuration et au sound system n’enlèvent rien à l’expérience physique et à l’énergie transmise pendant le concert qui va en crescendo jusqu’à une apothéose en rappel. Les passions se déchaînent alors sous la lumière peu flatteuse et blanchâtre d’une ampoule qui pendouille au dessus de la fosse, donnant à l’ensemble un petit côté ‘rave dans un vieux hangar’ très underground. Hâte de découvrir ce qu’il s nous réservent l’année prochaine…

Auteure : Laurence Etilé

Photographe : Jérôme Jacques