Ghost

01 Décembre 2015 –  Nous entamons le dernier mois de 2015, une année marquée par un grand nombre de très bons concerts. Ce soir, ce sont les suédois de Ghost qui vont se produire sur la scène de notre beau Bikini. Ce que nous allons vivre, nous ne sommes pas prêt de l’oublier…
Il est un peu plus de 19h lorsque j’arrive aux abords de la salle, la file d’attente est déjà formée et n’aura de cesse de s’agrandir jusqu’à l’ouverture des portes.

20h30, le Bikini, qui se remplit progressivement, est plongé dans le noir et la soirée s’amorce en douceur avec Dead Soul. Le groupe vient nous présenter quelques titres de son nouvel album The Sheltering Sky,  produit par Century Media et Razzia Notes Records (Anders Fridén). Lorsque j’ai écouté leur musique, mélangeant dark électro, doom rock et blues, j’avais bien accroché, je suis donc curieuse de découvrir ça en live. Le chanteur Anders Landelius, apparait alors en parfait dandy: costard, chapeau et lunettes noires. Il est accompagné de deux musiciens, dont son complice Niels Nielsen (et manager de Ghost), tous deux équipés d’une guitare, d’un micro et d’un clavier. Le trio va nous jouer des morceaux tels que The Fool et son refrain lancinant, la planante Lost my will ou encore Burn forever. Des titres qui font penser à un mix de sonorités rappelant Depeche Mode, NINE, ou bien Type O teintés par des accords et une voix ultra bluesy. Malgré tout, je ne rentre pas dans le show, les guitares (trop) saturées ne se démarquent pas des samples projetés à fond les ballons. Il m’a clairement manqué la présence de musiciens pour assurer la partie rythmique, quel dommage de ne pas retrouver la qualité de leur Live in Studio Underjord… Les 30 minutes semblent bien longues et les applaudissements du public sont assez timides, polis. En espérant les revoir, avec une bande au complet et ressortir plus enthousiaste.

Il faudra ensuite être patient car le changement de plateau va prendre du temps. Le décor se met en place, la foule s’amasse et nos naseaux s’imprègnent de l’odeur d’encens qui envahit la salle pendant que des mélodies religieuses résonnent. Le gens s’agglutinent, la tension monte et l’impatience se fait sérieusement sentir…

Il faut dire que le phénomène Ghost intrigue et la popularité du groupe s’accroît à une vitesse folle. Certains les avaient découverts au Hellfest en 2011, dans mon cas ce fut lors de l’édition 2013. Leur prestation qui clôturait les trois jours de festival ne m’avait pas subjugué, la fatigue et le froid n’aidant pas. Aujourd’hui, les anonymes membres du Clergé et leur Pape sataniste sont partout, même à Rock en Seine ou sur Canal +. Les hérétiques ont su conquérir un public éclectique avec leur musique rock où le doom et le heavy métal se mêlent à des sonorités plus pop. Un mélange audacieux qui prend toute sa dimension en live grâce à leur identité visuelle forte et une mise en scène parfaitement millimétrée… Ghost écume les salles depuis la sortie du troisième album Meliora.

L’heure de la messe a sonné, le Bikini s’assombrit et le sublime décor aux allures d’église s’illumine. Les musiciens, ces Goules sans noms apparaissent à travers l’épaisse brume verte, les premiers accords de Spirit retentissent. Papa Emeritus, troisième du nom, nous offre une entrée magistrale dans son bel habit de cérémonie. Puis, les guitares crépitantes de From The Pinnacle to the Pit explosent, la foule est déjà complètement déchaînée! Ça promet. Moi qui n’avait pas été particulièrement séduite en 2013, trouvant les musiciens trop statiques et le tout un peu linéaire, j’étais forcément septique. Là, je dis adieu scepticisme et bonjour rock’n’rol l! Ghost nous balance ses meilleurs titres avec une très belle énergie, les classieuses Goules masquées brillent dans leurs nouveaux costumes et s’agitent dans tous les sens. Le son est bon et le jeu de lights superbe.

Papa Emeritus mène ses fanatiques adorateurs de Satan à la baguette, le public se prosternerait presque devant ce charismatique frontman. « Old one, Master ! All beauty lies within… » Le refrain de Majesty fait écho entre les murs du Bikini et nous sommes de plus en plus compressés. Le vocaliste nous présente ses nones qui s’approchent, un peu gauchement, les gens du premiers rang seront conviés à célébrer l’Eucharistie. A part tremper ses lèvres dans du vin et se dire qu’une hostie c’est vraiment dégueulasse (pour les novices), c’était sans grand intérêt ! Le Pape délaissera son costume ecclésiastique pour une tenue plus sobre, juste chic. Il parcourt fièrement la scène et, si je ne suis pas super fan de sa voix, il faut reconnaître que ce mec en impose. Gracieux et plein d’humour, Papa Emeritus s’amuse à faire rire son public dont il se veut proche, il viendra même serrer quelques mains. Musicalement, je me délecte des riffs puissants avec, notamment, l’excellente Cirice, entraînante Absolution ou la puissante Mummy Dust ainsi que des rythmiques ultra groovy comme dans Year Zero, ça envoie ! Dans le pit, les slams et les pogos vont bon train.

Ghost nous offre également de la douceur avec la très jolie He is dont le refrain est repris par tous les spectateurs, on assiste à une vraie “communion”. On apporte des chandeliers, les énergiques Goules s’assoient s’accompagnant de guitares sèches pour nous livrer une chouette version acoustique de Ghuleh/Zombie Queen. Le groupe ne pouvait pas s’en aller sans interpreter leur cover de If you have Ghosts de Roky Erickson. Les membres du Clergé quittent la scène mais les clameurs de la foule enfiévrée les rappellent pour un ultime morceau. Le Pape introduit l’orgasmique Monstrance Clock : “Come together, together as a one, come together, for Lucifer’s son!”. Les voix s’élèvent en chœur une dernière fois en l’honneur de Lucifer avant que les suédois ne quittent définitivement la scène, acclamés par un public plus que conquis.

Un show magistral orchestré d’une main de maître par un Papa Emeritus à la fois impressionnant de charisme, plein d’humour et généreux ainsi que des musiciens techniquement et scéniquement au top. 1h30 à courir en étant sous ces costumes et masques…bravo ! Le sublime décor et les lumières permettent de se plonger dans l’univers farfelu, mystique et obscure de ces hérétiques adorateurs de Satan. J’étais septique, je suis maintenant convertie, Ghost c’est un tout et n’oubliez pas : “If you have ghosts, you have everything”…


Auteure : Fanny Dudognon

Photographe : Antony Chardon