Ce nouvel album des Néerlandais de Dodecahedron se veut un deuxième chapitre dans une discographie déjà fort honorable. Débutée par un opus éponyme sorti en 2012 et qui fut encensé dans les cercles d’initiés du nouveau Black Metal, ou du Métal Dissonant (voir ici; Deathspell Omega,  Gorguts, Plebeian Grandstand, Ulcerate et dernièrement Sunless avec leur excellent LP Urraca). On parle ici d’une maîtrise exceptionnelle des concepts et des sonorités du Métal, dans ce cas-ci sous ses formes les plus extrêmes.

Tel Emperor avec leur chef d’œuvre Anthems to the Welkins at Dusk, Dodecahedron accompli une dualité avec un paradigme semblable qui vise à obtenir un album magnifique en exploitant une musique répugnante. Leur Métal Dissonant mélange différentes orchestrations qui, dans un temps, forment des sonorités qui se veulent discordantes et qui deviennent des drones, ou bourdonnements, contrôlés et exploités de manière tangible pour l’oreille humaine. On est loin des trips de bruits de certains groupes musicaux qui insèrent quelques drones ici et là pour suivre la tendance. Ces sons, utilisés de manière judicieuse, apportent une profondeur à la musique créée par l’artiste et Kwintessens ne serait pas le même album si les drones étaient absents. Au même titre que les éléments de musique électroniques qui utilisés avec parcimonie mais presqu’omniprésents apportent une présence et fusionnent avec la dualité évoquée précédemment.

En évitant les répétitions et les raccourcis, les compositions de Dodecahedron sont presque mécaniques telle la dernière minute de Tetrahedron : The Culling of the Unwanted from the Earth. Plus l’album progresse plus la musique se complexifie surtout lorsque l’on écoute le troisième titre, Hexahedron : Tilling the Human Soil, l’album prend véritablement son envol et les prouesses techniques de Jasper Barendregt derrière la batterie n’est qu’une des nombreuses facettes qui rendent cette pièce la meilleure de 2017 jusqu’à présent.

Lorsqu’Interlude débute on croirait entendre un riff de guitare post-rock et on nous révèle encore une autre facette de Dodecahedron. C’est-à-dire, qu’ils osent en tant qu’ambassadeurs de la musique Extrême à s’aventurer près du Post Black Metal que certains puristes de la première et seconde vague du Black Metal considèrent comme une trahison vis-à-vis de sa forme la plus pure. Sans vouloir rendre un genre ou une étiquette plus réductrice tant de l’une que de l’autre, Dodecahedron ne devrait être qualifié par aucun genre ou sous-genre musical. Ce qu’ils produisent comme musique est beaucoup plus imposant qu’une étiquette telle que le Métal. Ceci étant avancé en toute connaissance de cause qu’il est très cliché que d’écrire une critique musicale d’un album et de refuser de qualifier ou de classer un groupe dans une catégorie propre à elle.

Malgré la pléthore d’albums maintenant disponibles on pourrait croire que la qualité en est diluée par le marché. Rien n’est d’autant plus faux, certes un nombre incalculable de productions se perdront dans les abîmes de la mauvaise musique. Malgré tout, on arrive à élaborer des listes de plus en plus longues d’albums à ne pas manquer. Pour ce qui est de Dodecahedron, qui est loin de se faire trop présent avec un album sorti tous les cinq ans, c’est une offrande qui va bien au-delà des espérances. Cependant, cet intervalle nous permet de bien digérer toute la grandeur et la complexité de leur musique. Ainsi, Kwintessens réussi à livrer la promesse de son titre audacieux dans une forme répugnante et attirante à la fois.

9.5/10

Auteur: Michaël Parent