Vendredi passé, le 28 juillet, la première édition de 77 Montréal – un festival organisé par Evenko soulignant les 40 années de la musique punk – a eu lieu au parc Jean Drapeau. Il n’y a pas eu de Heavy Montréal cette année, mais cet événement a été un substitut assez réussi, quoi que plus court. Il régnait une ambiance familiale et festive, vraiment représentative du genre.

C’est Pale Lips qui ouvraient le bal à 12h30, seul groupe de la journée constitué seulement de femmes. Il n’était même pas annoncé dans l’horaire envoyé préalablement, qui nous informait que le festival débutait à 13h. Un peu dommage. Même si elles avaient un public restreint, elles ont tout de même débuté la journée en nous punk-rockant ça bien comme il faut avec les titres Don’t Take Your Switchblade to New York et Old Flame.

Barrasso a été l’unique groupe qui nous a chanté des tounes en québécois avec des titres de son album Des X, des croix, des pointillés (2015) tels que 7021 et Fil de fer. Lorsque les Ramones ont commencé à jouer, ils grattaient seulement vers le bas et Barrasso nous a fait un petit hommage en faisant de même l’instant d’une chanson. Bien qu’ils étaient de passage aux Francofolies l’année dernière, c’était la première fois que je les voyais et, franchement, pas la dernière. Mélodieux avec des teintes de hardcore, talk to me about it.

Genetic Control a enchaîné avec un Mike Price aka Polio Elvis (voix) méga-trop-dedans. La scène lui appartenait; il courait, grimpait sur les speakers, gambadait… Bref, il ne tenait pas en place et c’était comme s’il était tout jeune et que nous faisions un saut dans les années 80. Reconnus à l’époque pour leurs déguisements de scène, ils sont restés sage en ne portant que des shorts avec un imprimé de guerre. Ils ont fait plaisir à la foule avec Suburban Life, un de leur plus gros succès connu à travers le monde.

Changement de genre avec The Kingpins et leur groupe de ska, style beaucoup plus rythmique et dansant avec des saxophonistes et un claviériste. Formé en 1994, ils ont été actifs dix ans avant de se transformer pour devenir Lo and the Magnetics, marquant ainsi le changement de leur style musical. Sur scène, Lorraine Muller a délaissé son saxophone ténor pour nous interpréter quelques chansons et faire revivre la «Reine du ska» d’autrefois. Let’s Go to Work était au menu, bien entendu. Le chanteur nous a expliqué qu’il tentait une nouvelle expérience et nous a fait un moon en nous montrant ses dessous féminins avec dentelle. Il a reçu la réaction qu’il cherchait. Le groupe a clôturé en beauté la tranche montréalaise du festival (le tiers, ce qui n’est pas mal du tout, mais à la prochaine édition, si c’était la moitié ce  serait encore mieux).

Ensuite, The Creepshow, groupe ontarien de psychobilly, punk et rock’n roll all together est entré sur scène avec le mandat de faire compétition à The Kingpins et de faire bouger la foule qui avait considérablement grossie. Un peu difficile de ne pas tomber sous le charme de Kenda et de son énergie contagieuse. Après Run for Your Life, le groupe a continué avec une petite blague en dédicaçant leur chanson d’après aux Mapple Leafs de Toronto. Dès qu’ils ont entendu ce nom, la foule montréalaise a hué, mais elle n’avait pas encore saisi que le titre était Born to Lose. Personnellement, je l’aurais également dédicacée aux Canadiens de Montréal, mais il faut les comprendre, ils devaient bien plaire à tous les types de fans présents.

Ce fût le moment de la journée un peu décevant. Joyce Manor suivi de Jake Burns.

Le premier : un groupe de punk avec influences de pop. Ça part mal en partant. Les accords étaient répétitifs et ça manquait de mordant. Habituellement, je suis très ouverte côté musical, mais ce n’était pas ma tasse de thé. Peut-être que les revoir en spectacle me ferait changer d’idée et qu’ils ne sont tout simplement pas du fest material? Ensuite, Jake Burns. Well, he burned the vibe, that’s for sure. Tu te retournes et tu le vois tout seul assis sur un banc, jouant des airs de folk avec sa guitare acoustique. Il était le chanteur du groupe Stiff Little Fingers et ils avaient fait leurs débuts en 1977, ce qui concordait parfaitement avec le concept de l’événement. La prestation à laquelle nous avons assistée n’avait toutefois rien à voir avec le punk rock; le groupe a eu ses années glorieuses, mais seul, Jake Burns ne faisait pas le poids (ce qui est bien normal). La foule s’est dispersée et ne semblait pas trop comprendre, mais quelques infatigables sont restés jusqu’à la fin, profitant de ce petit moment de répit et plongeant dans la nostalgie du passé.

Ce n’est pas plus grave que ça, parce que Madball a enchaîné et a enflammé la scène avec son punk hardcore. Après les deux premières chansons, le chanteur Freddy Cricien était trempé comme s’il sortait d’une piscine tout habillé. Vous pouvez vous imaginer ce qui se passait sur scène; c’était une véritable explosion après ce qu’on venait d’assister. Avec leur look de rappeurs, le quatuor new-yorkais avait de l’agressivité dans les tripes et ce fut la seule dose qu’on a reçue de la journée. Une sacrée bonne dose. Les amoureux de mosh pit s’en sont donnés à coeur joie sur Set It Off, un de leurs titres les plus populaires qui a parti leur carrière. Une jeune femme est sortie de la foule couverte de terre, la peau toute écorchée, mais elle était de retour la chanson d’après avec deux band aids en prime et le goût de continuer à mosh piter jusqu’à la dernière seconde. Une vraie de vraie.

The Bouncing Souls ont changé l’atmosphère qui est devenue beaucoup plus festive. Formé en 1987, le groupe a 30 années à son actif et continue de faire des tournées; ils sont loin de mettre leurs instruments au repos. Ayant sorti un tout nouvel album en 2016, Simplicity, ils en ont joué quelques titres comme Writing on the Wall mais ont interprété leurs vieux morceaux populaires tels que Lean on Sheena, question de faire chanter les fans avec leurs refrains entraînants. Le chanteur Greg Attonito se promenait dans le couloir menant à la console, au grand bonheur du public qui chantait avec lui.

The Vandals. Un groupe qui ne passe pas inaperçu avec ses chansons satiriques.  En les écoutant chanter My Girlfriend’s Dead  et Live fast Diarrea, c’est impossible de les prendre au sérieux et c’est ce qui est si caractéristique du groupe. Ils provoquent, but in a good way. Avec le guitariste Warren Fitzgerald et son accoutrement faisant penser à l’excentricité de Don Cherry, on n’a pas le temps de s’ennuyer. Il portait un polo rouge avec un t-shirt bleu par-dessus avec des pantalons rouges, le tout pour matcher sa guitare. Il est même allé jusqu’aux souliers et aux bas! Il a bien fait rire la foule quand il a délaissé sa guitare pour nous interprété la dernière chanson et aller se dandiner sur la console, arrêtant même de chanter lorsqu’il n’était pas filmé. On ne dit jamais non à un bon brin de folie.

Dernier groupe avant le headline de la soirée,  X n’a pas laissé sa place. Fêtant leur 40e année de carrière, le groupe américain est présentement en tournée et les organisateurs du festival ont été bien chanceux de leur mettre la main dessus. Leur groupe mélange beaucoup les styles musicaux, melting pot de punk rock, cowpunk et rockabilly mais à bonne dose. Ils sont reconnus pour avoir évolués tant sur le plan musical que sur l’aspect politique de leurs chansons avec des titres comme Country at War et Someone’s Watching. Le groupe joue ensemble occasionnellement et n’a plus l’énergie d’autrefois, mais il y a toujours une chimie entre les musiciens; après autant d’années, ça va un peu de soi. La musique coulait bien, la foule était vaste et dansante et plus que prête pour ce qui s’en venait.

S’il y avait quelques personnes assises à des tables pendant X, elles étaient toutes debout pour Dropkick Murphys. Le public (moi, moi, moi) attendait le groupe avec beaucoup d’impatience et l’a chaudement accueilli. Il y avait pleins de jeunes enfants sur les épaules de leurs pères, assistant à leur premier concert de punk et marchant dans les mêmes pas que leurs parents, veste de jeans et mohawk inclus. Le groupe de punk rock celtique originaire du Massachussets a débuté avec Lonesome Boatman et le délire – mais quel beau délire – a débuté en même temps : mosh pit et bodysurfers du début à la fin. Pendant la chanson Blood, les paroles étaient projetées sur l’écran à l’arrière de la scène, question que tous puissent chanter ensemble et qu’on soit transportés dans un méga karaoké en plein air. Ils ont ensuite joué leurs titres plus populaires : Rose Tattoo, The State Of Massachusetts et I’m Shipping Up to Boston. Ils ont livré un show intense du début à la fin; six gars qui nous ont fait tripper avec leur bouzouki et leur mandoline. Le chanteur Al Barr était au top de sa forme (c’est quand qu’il ne l’est pas?), comme s’il avait dormi trois jours avant de mettre les pieds sur scène. Ils ont terminé avec Until the Next Time en faisant monter pleins de chanceux (majoritairement chanceuses) sur scène pour danser et festoyer jusqu’à la toute fin. Avec les pétards et confettis, on aurait pu croire que c’était le seul headline de la soirée. Si vous ne les avez jamais vus, je vous suggère de remédier à la situation. Satisfaction garantie 100%. 

Vu que Rancid jouait sur la même scène, il y a eu une petite pause de vingt minutes. Ça nous a permis de retrouver nos voix et de l’énergie dans nos petits doigts. Dernier groupe de la soirée, la barre était haute après Dropkicks Murphy et selon moi, ce sont eux qui auraient dû clore le festival. Cela n’empêche pas que le groupe californien a vraiment bien performé et qu’ils ont fait bouger la foule qui n’arrêtait pas de chanter et danser, véritable boule de feu. Ils ont commencé en force avec Roots Radical et ont gardé Time Bomb vers la fin, question de pimenter la setlist. Ruby Soho a clairement été un des moments forts, comme lorsque des membres de Madball sont venus sur scène. Rancid a toujours été indépendant et imprime lui-même sa marchandise, alors ce n’est pas surprenant que ce soit le groupe de la journée qui a fait un commentaire sur l’importance de la liberté d’expression. Ils n’ont pas déçu leurs fans et ont terminé le festival en beauté.

Ce n’est qu’à moitié vrai, car Dropkicks Murphys est venu les rejoindre sur scène pour le rappel. Ce n’était pas une surprise, car c’était annoncé préalablement, mais c’était définitivement la meilleure façon de finir ce festival. Ils ont joué Cretin Hop des RamonesI Fought The Law de The Clash, suivi de Folsom Prison Blues de Johnny Cash. C’est avec TNT d’AC/DC qu’ils nous ont laissés. Wow, juste wow. Pour une première édition, 77 Montréal a été un succès et j’ai bien hâte à l’année prochaine. On ne voit pas des bodysurfers en chaise roulante à tous les jours. Clairement à mettre au calendrier 2018.

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Jake Burns

Auteure: Laura Gauthier

Photographe: Hélène Dickey